Définition : qu’est-ce que le développement durable ?
Rédigé en 1987, le rapport Brundtland donne une définition officielle du développement durable :
La notion de développement durable signifie simplement : satisfaire les besoins (en eau, électricité, nourriture, etc) des générations actuelles sans mettre en péril les besoins des générations futures.
Le développement durable ou développement soutenable (sustainable development en anglais) est un terme employé depuis la fin du XXème siècle pour qualifier une croissance économique qui serait compatible avec les limites du monde fini matérialisé par la planète Terre. Selon cette théorie, l’économie mondiale, reposant sur l’extraction exponentielle de ressources énergétiques et matérielles, pourrait continuer à se développer sans affecter les écosystèmes. Cette notion a été largement promue par les institutions internationales dont les Nations Unies, l’Union Européenne ou encore la Banque Mondiale via les ODD (Objectifs de Développement Durable), les agences de développement française (AFD), états-unienne (USAID) ou allemande (GIZ), les grandes fondations des philanthropes capitalistes (Famille Rockefeller, Warren et Howard Buffet, Bill et Melinda Gates, etc), les grandes entreprises multinationales et les Etats. Changement climatique, extraction pétrolière et gazière, extraction minière, déforestation, désertification, inégalités économiques et sociales, extermination des espèces sauvages, toutes les conséquences néfastes de la croissance économique seraient comme par enchantement solutionnées par un développement dit « durable ».
En vérité, le développement durable est une vaste fumisterie, une campagne marketing avec pour objectif le maintien du statu quo.
Quelques pistes avancées par les promoteurs du mensonge du développement soutenable :
- Instaurer davantage d’équité entre pays développés et pays en voie de développement ;
- Contraindre les acteurs économiques à limiter les externalités négatives pour une meilleure protection de l’environnement ;
- Impliquer davantage les parties prenantes (Organisations Non Gouvernementales, associations de consommateurs, etc) dans les processus de décision au niveau du gouvernement et dans la gouvernance des entreprises ;
- Découplage entre la croissance économique et la consommation de ressources naturelles, d’énergie.
Bien entendu, tout ceci n’est que de la poudre aux yeux. Le développement « durable » fait tout autant de dégâts que le développement tout court. La promesse d’un développement économique pouvant devenir soutenable sert à entretenir l’espoir chez les populations d’un capitalisme techno-industriel qui bénéficierait au plus grand nombre sans détruire la planète. En attendant, les multinationales poursuivent leur oeuvre destructrice. Plus de 40 millions de personnes sont esclaves et 152 millions d’enfants travaillent dans le monde selon le Bureau International du Travail, les insectes, les oiseaux, les écosystèmes marins ou les grands mammifères continuent à être décimés à une vitesse croissante, les forêts primaires sont rasées, les réservoirs d’eau douce se raréfient et sont accaparés par des multinationales, etc.
Un des principes théoriques du développement durable repose sur la possibilité d’un découplage entre croissance économique et impact sur l’environnement. Mais c’est impossible, notamment en raison des effets rebonds dans une économie en croissance. Cette notion pose d’innombrables autres problèmes, dont le maintien d’une organisation sociale profondément inégalitaire ou encore la perpétuation d’une fracture entre culture et nature, entre le monde civilisé et le monde naturel.
Le développement durable rend les problèmes « durables »
Le développement durable ne change rien au fond du problème. La transition énergétique – le passage des énergies fossiles aux renouvelables – est l’élément central du développement durable, l’objectif étant de « décarboner » nos économies. Or, les énergies renouvelables dépendent aussi des énergies fossiles et nécessitent l’extraction croissante de nouvelles matières (sable, graviers, métaux, etc.)
Pour construire des panneaux solaires et des éoliennes, il faut d’énormes quantités de béton, un matériau utilisant de l’eau, du ciment, du sable et du gravier pour sa fabrication. Selon l’ONU, la demande mondiale de sable et de gravier s’élève entre 40 et 50 milliards de tonnes par an. Ces matières premières sont extraites du lit des rivières et des plages provoquant pollutions, inondations, abaissement des aquifères et aggravation de la sécheresse. Pour extraire du sable et du gravier, des excavatrices et/ou des engins de chantier sont utilisés. Dans les pays pauvres, ce sont souvent des femmes qui, à la force de leurs bras, récoltent le sable des plages pour le vendre en espérant en tirer un maigre revenu. Sable et gravier sont ensuite transportés par camion jusqu’au lieu où ils seront tranformés en béton.
A l’instar de toutes les constructions en béton, les centrales éoliennes et solaires détruisent l’habitat écologique de nombreuses espèces. La perte et la fragmentation de l’habitat est pourtant la première cause d’extermination de la biodiversité dans le monde. En plus de ruiner les paysages, les éoliennes déciment également insectes, oiseaux et chauve-souris. Les pales d’éoliennes, elles, sont de plus en plus souvent réalisées en matériaux composites dérivés du pétrole.
L’expression « transition énergétique » s’avère tout aussi inappropriée puisque la production d’électricité issue des renouvelables s’additionne à celle des énergies fossiles. Les énergies dites « propres » ne remplacent pas du tout les énergies dites « sales ». Même si, dans le monde idéal des promoteurs du développement durable, nous pourrions nous passer des énergies fossiles, cela ne réglerait pas la question de l’extraction des matières premières alimentant tout le système. Notre civilisation industrielle a extrait et transformé en 2017 environ 92 milliards de tonnes de matières premières d’après le Panel des ressources de l’ONU publié en 2019. Cette extraction est responsable de 50 % des émissions de gaz à effet de serre, de 90 % du stress hydrique et de 90 % de l’extermination de la biodiversité. Sur les 92 milliards de tonnes de matières premières extraites, les énergies fossiles représentent seulement 15 milliards de tonnes, soit 16 % du total. La biomasse (agriculture, sylviculture, pêche, etc) représente 24 milliards de tonnes (26 %) et les minéraux non métalliques (sable, gravier, argile) 44 milliards de tonnes (48 %).
Pour en savoir plus, voir cet article sur la transition écologique, une expression qui a remplacé « développement durable » dans le langage des élites politiques et économique en France mais qui veut dire à peu près la même chose.
Comme le disait très justement l’économiste Kenneth Boulding :
« Celui qui croit que la croissance peut être infinie dans un monde fini est soit un fou, soit un économiste ».
Les partisans du développement durable ne remettent absolument pas en question le dogme de la croissance.
Les 3 piliers du développement durable
Pour étoffer le mensonge du développement durable, les élites ont élaboré toute une théorie reposant sur trois piliers : écologie, économie et social. L’objectif serait de mettre en place un système capable d’être économiquement efficace, socialement équitable et écologiquement viable. Dans ce modèle, la production et la consommation de produits et services auraient un impact réduit sur les écosystèmes et permettrait à l’ensemble des acteurs de percevoir un revenu suffisant pour vivre de manière décente.
Un schéma représentant les 3 piliers du développement durable est souvent utilisé pour illustrer la notion de développement durable. Un pilier social, un pilier économique et un pilier écologique forment un point d’équilibre représentant un développement souhaitable. Ce schéma a le mérite de simplifier la compréhension (ou la propagande), mais la réalité est bien plus complexe.
Ce point d’équilibre n’a jamais été atteint par aucune entreprise ni aucun acteur économique, et il ne sera très vraisemblablement jamais atteint.
Historique et définition du développement durable
Le Rapport Brundtland
A l’origine, on a commencé à parler du développement durable dans les années 80. L’expression a été popularisée par le rapport Brundtland de la Commission mondiale sur l’environnement et le développement de l’Organisation des Nations Unies (ONU). Il y figure la définition du développement durable :
“Le développement durable est un mode de développement qui répond aux besoins des générations présentes sans compromettre la capacité des générations futures de répondre aux leurs.”
Les Sommets de la Terre
Les Sommets de la Terre organisés tous les dix ans par l’ONU depuis le premier sommet de 1972 à Stockholm montrent un début de prise de conscience des dirigeants de l’urgence envrironnementale. Le Sommet de Rio de 1992 a lancé la Convention-Cadre des Nations Unies sur les Changements Climatiques (CCNUCC). Elle instaure trois grands principes :
- le principe de précaution
- le principe des responsabilités communes mais différenciées
- le principe du droit au développement
Cette convention reste non contraignante juridiquement pour les Etats.
Il y aurait beaucoup à dire sur les Sommets de la Terre, notamment sur l’incapacité chronique des dirigeants politiques à prendre des mesures contraignantes pour obliger la sphère privée à limiter les dégâts environnementaux.
Le protocole de Kyoto
Le protocole de Kyoto est un accord international faisant suite à la Convention-cadre des Nations Unies. Contrairement à celle-ci, l’accord de Kyoto instaure des objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre et un cadre légal plus propices à faire bouger les lignes. Afin de baser les négociations et la fixation des objectifs sur une base scientifique solide et indépendante, le GIEC (Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat) – IPCC en anglais – a été créé en 1998. Il publie régulièrement des rapports d’évaluation sur l’évolution du changement climatique.
Les enjeux du développement durable
Cette nouvelle conception de la croissance – parfois appelée croissante verte – est, pour les élites politiques et économiques, la seule et unique voie possible. Même dans les « démocraties » occidentales (qui n’ont de démocratie que le nom, soit dit en passant), la classe dominante impose le développement durable sans aucune forme de débat public.
Pour paraître plus crédible et mobiliser davantage de personnes, l’idéologie du développement durable tente d’intégrer d’autres facteurs :
- Malgré un recul de l’extrême pauvreté, la redistribution des richesses reste très inégale entre pays et au sein même de ceux-ci ;
- Des millions de personnes souffrent encore de la faim alors qu’en Occident l’obésité et les mauvaises habitudes alimentaires dégradent la santé des populations ;
- Selon un rapport de l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), 1,3 milliard de tonnes de nourriture finissent chaque année à la poubelle, soit un tiers de la production mondiale ;
- L’agriculture intensive dégrade les sols, émet de grandes quantités de CO2, de leur côté les intrants chimiques détruisent la biodiversité et contaminent la nourriture ;
- La concentration de gaz à effet de serre dans l’atmosphère augmente régulièrement, car les activités humaines au sein de la civilisation industrielle sont quasiment toutes dépendantes des énergies fossiles (charbon, pétrole et gaz) grandes émettrices de dioxyde de carbone ;
- L’idéologie du développement durable pousse à son paroxysme la vision utilitariste de la nature. Les services écosystémiques rendus par la biodiversité devraient être intégrés dans notre modèle économique (insectes pollinisateurs indispensables pour l’agriculture, les forêts stockent des quantités immenses de CO2, etc.). C’est en cours avec la financiarisation de la nature.
Les objectifs fixés par l’ONU
L’ONU a fixé en 2015 une feuille de route avec 17 objectifs de développement durable (17 ODD) à atteindre d’ici 2030. Parmi les objectifs prioritaires figurent l’éradication de la pauvreté et de la faim, l’accès aux soins pour tous et la protection de l’environnement.
Pour chacun de ces objectifs, l’ONU fournit la marche à suivre pour les pays membres et insiste sur les interconnexions entre chaque problématique. Il y a un lien évident entre agriculture intensive, industrie agroalimentaire et difficultés pour l’accès à l’eau dans les pays du Sud. Pour respecter ces 17 ODD, une coopération étroite entre pays s’avère indispensable d’après les Nations Unies.
Non seulement certains de ces objectifs sont contradictoires, mais on peut aussi déceler du une forme de colonialisme dans l’idéologie du développement, dans cette volonté de vouloir étendre le même système économique nuisible partout sur la planète. Dans le détail de l’objectif n°8 « Promouvoir une croissance économique soutenue, partagée et durable, le plein emploi productif et un travail décent pour tous » apparaît la cible à atteindre pour les pays « les moins avancés » : un taux d’au moins 7 % de croissance du PIB chaque année.
La Chine donne un bon exemple des conséquences d’une croissance soutenue. L’Empire du milieu a atteint une moyenne de 10 % de croissance sur quatre décennies, c’est un désastre environnemental et social. Un grande partie des rivières du pays sont très polluées, au moins 1,6 million de chinois décèdent chaque année à cause de la pollution de l’air aux particules fines et nous apprenions récemment que la plupart des produits chinois bon marché proviennent d’un camp de travail – les laogaï – où 4 millions de personnes seraient retenues prisonnières.
Les pseudo-solutions pour un développement soutenable
Pour faire de la lutte contre le changement climat et la préservation de l’environnement une priorité, nos amis croissancistes s’acharnent à promouvoir le mythe de la croissance verte à l’aide de différents concepts fumeux :
- Transition énergétique : abandonner peu à peu l’énergie fossile et développer les énergies renouvelables ;
- Economie circulaire : adopter l’éco-conception, combattre le gaspillage et l’obsolescence programmée, opter pour le recyclage et la valorisation des déchets ;
- Economie Sociale et Solidaire (ESS) : encourager la collaboration, la mutualisation et privilégier l’utilité sociale avant la course aux résultats économiques ;
- Commerce équitable : encourager une consommation responsable pour offrir un revenu décent aux producteurs situés dans les pays en développement ;
- Responsabilité Sociale des Entreprises (RSE) : inciter les entreprises à se lancer dans une démarche RSE avec pour objectif de maximiser leur impact positif sur la société et l’environnement, en d’autres termes réduire les externalités négatives.
Alors que tout démontre qu’il nous faudrait décroître de manière radicale pour limiter le changement climatique et sauvegarder ce qu’il reste de la biodiversité, ces concepts contribuent à entretenir l’illusion d’une mutation vertueuse du capitalisme techno-industriel.
Faire évoluer les indicateurs économiques
La question des indicateurs du développement durable revient régulièrement sur le devant de la scène. Actuellement, l’indicateur économique généralement utilisé pour mesurer la croissance économique reste encore et toujours le PIB, or celui-ci ne prend absolument pas en compte les dégâts sur l’environnement, le bien-être des habitants dans chaque pays ou encore les progrès réalisés.
D’autres indicateurs ont été créés pour avoir une meilleure perception du développement d’un pays, notamment au niveau humain. C’est pour cette raison qu’en 1990, le Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD) a créé l’indice de développement humain (IDH). Ce nouvel indicateur repose aujourd’hui sur le revenu national brut par habitant, l’espérance de vie et le niveau d’éducation.
L’OCDE a déjà commencé à plancher sur le sujet en produisant un indicateur mesurant le bien-être. Selon cet indicateur, des pays comme le Canada, la Norvège, l’Islande ou la Suède figurent parmi les plus “heureux”. Mais la consommation d’antidépresseurs a augmenté de manière vertigineuse au cours des dernières années dans ces mêmes pays selon une étude de… l’OCDE.