Secteur IT : Minimalisme et Low Tech pour réduire l’empreinte écologique
Secteur en pleine croissance, le digital représente 7 % de la consommation mondiale d’électricité. Dans ce contexte, repenser les systèmes d’information et les services numériques devient une priorité pour réduire leur impact environnemental. Pour la rédaction de cet article, j’ai eu l’occasion de m’entretenir avec un expert en la matière : Frédéric Bordage consultant en numérique responsable et fondateur du blog GreenIT.fr en 2004, blog de référence sur le numérique responsable.
Le projet Green IT
Frédéric Bordage fut l’un des premiers en France à s’intéresser à la conception de systèmes d’information plus efficients et moins impactants pour la planète. Il intervient en tant que consultant IT auprès de grandes entreprises privées et publiques partout en Europe, dans deux domaines :
- la mise en place d’une stratégie Green IT : tout le système d’information est concerné (terminaux, réseaux, logiciels, etc)
- la conception responsable de services numériques selon le standard international ISO 14062 qui définit les normes en matière d’éco-conception
Il consacre également une part importante de son temps à la communauté green IT et au développement d’outils gratuits permettant aux professionnels du numérique d’évaluer leur empreinte environnementale et de la réduire.
Quelques-unes des initiatives et projets autour du GreenIT :
- le Club Green IT regroupe les responsables green IT, RSE et innovation de grandes entreprises qui souhaitent échanger et partager des connaissances/compétences sur le thème du numérique responsable
- à travers l’initiative WeGreenIT du WWF France, 50 entreprises peuvent bénéficier d’un audit gratuit de leur système d’information afin d’évaluer son empreinte environnementale
- le collectif Conception Numérique Responsable regroupe des acteurs de la sphère publique et privée. Elle a pour ambition de devenir la communauté de référence en Europe en matière de conception responsable (dont écoconception) de services numériques.
Empreinte écologique du web : fabrication et utilisation ont le plus d’impact
Selon le rapport Clicking Clean publié en 2017 par Greenpeace, le secteur informatique représente déjà 7 % de la consommation mondiale d’électricité et ce chiffre ne cesse de croître.
Frédéric Bordage a publié un article sur GreenIT.fr détaillant à quel niveau l’écosystème web est le plus impactant. Et c’est du côté de la fabrication et de l’utilisation que la consommation d’énergie est la plus importante :
“L’épuisement des ressources non renouvelables, les pollutions et les impacts sanitaires ont lieu essentiellement lors de la fabrication et de la fin de vie des équipements électroniques. Les émissions de gaz à effet de serre sont également réparties entre fabrication (48 %) et utilisation (52 %). En revanche la consommation électrique (68 %) et d’eau (84 %) est prépondérante sur la phase d’utilisation.”
Un internaute possède une empreinte annuelle moyenne de :
- 350 Kwh d’énergie
- 200 kg de gaz à effet de serre
- 3 000 litres d’eau
L’empreinte écologique du web au niveau mondial serait de :
- 1047 TWh d’énergie soit 40 centrales nucléaires
- 608 millions de tonnes de gaz à effet de serre
- 8,7 milliards de m3 d’eau
Les centres de données (data center) dont je parlais dans un précédent article sur Google ne sont finalement pas les ogres consommateurs d’électricité montrés du doigt par les médias et les ONG. D’une part, le taux d’équipement des utilisateurs a été multiplié par 6 en 30 ans pour atteindre 200 terminaux pour 1 serveur. D’autre part, des progrès dans l’efficience énergétique ont par exemple permis à Google de réduire de 50 % la consommation électrique de ses centres par rapport à un data center moyen. En revanche, ils restent de grands consommateurs d’eau.
Eco-conception web : less is more
Avec certains sites web consommant 700 fois plus de bande passante que d’autres pour délivrer le même service, on comprend mieux l’importance de concevoir des services numériques plus sobres. La démarche d’écoconception web consiste à mettre en place des bonnes pratiques afin de réduire l’impact environnemental et de réduire les coûts en faisant plus avec moins.
Parmi ces bonnes pratiques, on trouve :
- Éliminer les fonctions non essentielles : par exemple, lors de la réservation d’un billet de train, quel est l’intérêt d’offrir la possibilité de partager cette information sur Twitter et Facebook ?
- Quantifier précisément le besoin : faut-il construire une page où l’on présente 25 produits ou plutôt 5 produits ? Des études réalisées dans un rayon de supermarché montre l’impact du nombre de références sur les consommateurs. Trop de choix génère de l’anxiété et provoque une baisse du niveau de satisfaction. Même combat sur le web.
- Design mobile first VS responsive : là où le design responsive cherche à adapter un affichage desktop au mobile, le design mobile first consiste à partir de l’écran de Smartphone dès le départ du projet afin de placer l’ergonomie et la sobriété au coeur de l’architecture du site web.
Frédéric Bordage propose même des solutions Low Tech :
“Des solutions low-tech comme l’envoi de SMS peuvent parfaitement remplacer un site web lourd et inefficient où l’utilisateur peine à trouver l’information dont il a besoin.”
Le collectif Conception Numérique Responsable propose plusieurs outils et documents pour évaluer et optimiser la performance environnementale d’un site web :
- Une certification pour les professionnels
- Une checklist issue du livre “Eco-conception web : les 115 bonnes pratiques”
- Un outil Ecoindex.fr pour évaluer la performance environnementale d’un site web