Un énorme gisement de lithium bientôt exploité en République Démocratique du Congo
La firme australienne AVZ Minerals devrait sous peu démarrer l’exploitation d’un gisement de lithium estimé à 6,6 millions de tonnes à Manono, dans la province du Tanganyika en République Démocratique du Congo (RDC). Selon l’entreprise, la zone abrite aussi des réserves de 300 000 tonnes de cassitérite (minerai d’étain) et de 13 200 tonnes de coltan (ou colombotite-tantalite), un minerai dont on extrait le niobium et le tantale. Ces nouvelles réserves pourraient hisser la RDC au rang des premiers producteurs mondiaux de lithium dans les prochaines années.
Premier producteur mondial de cobalt, la RDC est une cible privilégiée des puissances impérialistes (Occident, Chine) pour son sous-sol riche en matériaux essentiels à la transition énergétique et, de manière générale, à la civilisation industrielle. Le sous-sol du pays contient d’autres richesses suscitant les convoitises ; diamants, or, cuivre, manganèse, charbon, pétrole, plomb, zinc, uranium, etc. Ce territoire d’une superficie trois fois et demi supérieure à la France abrite la seconde forêt équatoriale derrière l’Amazonie et de nombreuses espèces extrêmement menacées dont l’éléphant de forêt, le bonobo, le bongo, l’okapi ou les gorilles des montagnes.
La Banque Mondiale estime la croissance de la demande mondiale de lithium à 965 % d’ici 2050. La ruée vers le lithium, métal essentiel à la fabrication des batteries de voitures électriques, de téléphones « intelligents », d’ordinateurs et autres stupides objets connectés, est une sérieuse menace pour la planète ainsi que pour les habitants des terres ciblées par l’industrie extractive. Les géants américains du numérique Apple, Google, Dell, Microsoft et le fabricant de voitures électriques Tesla sont accusés d’encourager l’exploitation des enfants par les sociétés minières. Une étude menée par plusieurs économistes a également démontré un lien entre la présence de firmes étrangères et la flambée des violences sur le continent. Il y a quelques jours, près de 20 personnes – dont 12 éco-gardes du parc des Virunga – étaient abattus par des miliciens en RDC.
Propriété à 60 % d’AVZ Minerals, de La Congolaise D’exploitation Minière (30 %) et de Dathomir Mining Resources (10 %), le projet couvre 188 km². La mine à ciel ouvert, type d’extraction le plus polluant qui soit, devrait également extraire du coltan dont on obtient le tantale, un métal en majorité utilisé par l’industrie de l’électronique. On le trouve dans les condensateurs, les écrans à cristaux liquides ou les puces Dram (mémoire de stockage informatique). Il est aussi utilisé dans l’aviation, l’aéronautique et le secteur médical. Le site reprendra l’extraction d’étain démarrée en 1919 puis stoppée en 1982. Le niobium, lui-aussi tiré du coltan, entre quant à lui dans la fabrication d’acier et de superalliages pour divers industries (pipelines, domaine spatial, automobile, aimants supraconducteurs).
Au Chili, l’extraction du minerai du salar d’Atacama consiste à pomper la saumure présente dans le fond du lac salé puis de laisser évaporer l’eau. La solution très concentrée en lithium récupérée est ensuite transformée dans une usine pour en faire du carbonate de lithium destinée aux fabricants de batteries. Le site de Manono se différencie par la présence de lithium sous forme d’un minéral appelé spodumène trouvé en association avec la cassitérite (minerai d’étain) et la colombo-tantalite. Ces métaux se trouvent dans une roche dure d’origine magmatique appelée pegmatite. Pour miner, AVZ Minerals prévoit donc de creuser un puits à ciel ouvert, un procédé produisant de grandes quantités de poussières toxiques pour les populations et les cultures vivrières des environs.
Afin de fournir les 54 MW d’électricité nécessaire au fonctionnement de la mine, AVZ Minerals va réhabiliter la centrale hydroélectrique de Mpiana-Mwanga fermée en 1982 et située à 85 km sur la rivière Luvua, un affluent du fleuve Congo. L’entreprise se vante ainsi d’un projet « vert » puisque, dans l’esprit de la plupart des gens, un barrage coupant une rivière apparaît comme écologiquement et socialement acceptable. C’est bien sûr totalement faux. D’après une récente étude, la poussée de construction de barrages hydroélectriques est une catastrophe écologique et sociale. D’autres travaux d’infrastructures sont prévus, comme l’aménagement de routes pour acheminer la précieuse cargaison jusqu’au port de Dar es Salaam en Tanzanie situé à plus de 1800 km, dont une grande partie par camion. Le lithium devrait vraisemblablement être expédié vers la Chine.
Très écologique, la transition énergétique. En supplément la petite vidéo de présentation du projet Manono par AVZ Minerals où vous pourrez avoir un avant-goût du désastre écologique.
Cette course complètement folle aux métaux pourrait bientôt toucher la France. D’importantes réserves de lithium ont été découvertes en Alsace par l’entreprise Fonroche Géothermie, cette dernière estime la capacité de la production annuelle à 1500 tonnes.